vendredi 21 janvier 2011

Vox Populi, Vox Dei - Voix Et Pouvoir Michel Poizat

Si la foule se sent invincible tant qu'elle est unie derrière son chef ou l'idée qui la guide, c'est en vertu des mêmes motivations que celles qui animent l'amoureux mobilisant toute son énergie, surmontant obstacle et adversité pour la conquête, la défense ou la satisfaction de l'aimé. Tout s'effondre s'il vient à disparaitre : "Un seul être vous manque et tout est dépeuplé."

FÜHRER :
Hitler, Führer, doit son assomption à Hitler, c'est à dire "séducteur". La langue allemande souligne de façon particulièrement éclairante la parenté des deux mots et des deux fonctions. La voix est l'instrument de l'une et de l'autre, et l'instrument de la fascination d'Hitler fut sa voix et uniquement sa voix. Non pas ses discours, non sa voix ! Le "magnétisme" de son regard a, certes, souvent été souligné aussi, mais ne concernait guère que la sphère privé : les orchestrations de masse de l'hitlérisme ne lui laissaient aucune place, toute entière consacrées qu'elles étaient à la mise en scène de la voix.
Le "pouvoir hypnotique" d'Hitler sur les foules tout comme son "art de la manipulation" est sans cesse invoqué pour comprendre cette fascination.

Comment ces "aboiements", ces "éructations gutturales" ont-elles pu exercer un tel pouvoir de fascination, de séduction ? Pourtant innombrables sont les témoignages qui l'attestent. Une petite fille de six ans, peu suspecte d'être prise dans les mirages de l'adhésion politique se souvient de la première visite d'Hitler à Bayreuh en 1923 : "Sa voix prit du timbre et de la couleur, se fit plus profonde, au point que nous restions là assis comme un cercle de petits oiseaux charmés à écouter la musique sans prêter le moindre attention aux mots même qu'il prononçait.

"Certaines descriptions de discours d'Hitler insistent sur leur théâtralité : "Il était par dessus tout un acteur accompli, (...). Au début, l'observation d'un temps de pause faisait monter la tension; un départ discret voir hésitant; des ondulations et des variations de diction, certainement pas mélodieuse, mais vive et éminemment expressive; des explosions presque en staccato suivies d'un ralentendo calculé pour mettre en évidence un point crucial; l'usage théâtral des mains en pleins crescendo..."

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